Notre Mission
Profondément préoccupés par l’omniprésence des écrans et des réseaux sociaux dans la vie des adolescents âgés de treize à dix-huit ans, je me suis lancée dans cette aventure de retour à un téléphone basique.
Ce phénomène d'omniprésence des écrans, dont l’ampleur n’a cessé de croître, s’apparente à une révolution silencieuse qui façonne, souvent à leur insu, les structures mêmes des développement neuronal, social et émotionnel de nos enfants.
Les mécanismes dopaminergiques sollicités par les applications interactives — notifications instantanées, flux infinis de contenus, systèmes de récompense variable — induisent une stimulation répétée du circuit de la gratification. Pour un cerveau en maturation, cette sollicitation quasi incessante peut engendrer une fragilisation de l’attention volontaire, rendant plus difficile l’effort cognitif nécessaire à l’apprentissage soutenu. Les adolescents, immergés dans une avalanche de stimuli numériques, peinent alors à distinguer l’important de l’accessoire, le durable de l’éphémère.
Plus inquiétant encore, les réseaux sociaux modèlent insidieusement l’estime de soi. L’exposition permanente à des images soigneusement retouchées, à des récits de vie magnifiés, crée un étalon de comparaison artificiel. Il en résulte un sentiment d’insuffisance chronique, parfois même un effritement identitaire chez des jeunes encore en quête de repères. Les travaux récents en psychologie sociale montrent sans ambiguïté que cette confrontation quotidienne à une perfection simulée augmente les risques d’anxiété, de troubles dépressifs et de comportements compulsifs.
À cela s’ajoute la réduction progressive des interactions en présentiel, pourtant essentielles à l’élaboration des compétences socio-émotionnelles. Un simple écran interposé suffit à atténuer l’empathie, à lisser les nuances du langage non verbal et à favoriser une communication fragmentée, plus pauvre, souvent plus impulsive. À long terme, cette déperdition peut entraver la capacité des jeunes à construire des relations authentiques, équilibrées, et à faire preuve d’une véritable écoute de l’autre.
Il ne s’agit pas de condamner la technologie en bloc : elle recèle d’indéniables potentialités éducatives et créatives. Mais il est impératif de la réintroduire dans une logique d’usage maîtrisé. Éduquer les adolescents à comprendre les mécanismes qui les influencent, instaurer des temps d’écran raisonnés, encourager les activités hors ligne et les moments de déconnexion profonde ne sont plus des recommandations anecdotiques : ce sont des nécessités sociétales.
En somme, si nous souhaitons préserver l’intégrité cognitive et émotionnelle de nos jeunes, il nous incombe — parents, éducateurs, scientifiques et citoyens — de repenser notre rapport collectif aux technologies numériques. Sans cela, nous risquons de laisser une génération entière se construire au gré d’algorithmes dont les objectifs ne coïncident pas toujours avec leur bien-être.